Le dernier Raoul Ruiz terminé sans lui ?
Le 19 août dernier, le cinéaste franco-chilien Raoul Ruiz nous quittait. Il venait de nous livrer une oeuvre troublante de précision malgré ses 4h26, un véritable vertige narratif, historique et insensé, puissant et insaisissable, Mystères de Lisbonne. Le film sur lequel il travaillait avant son décès, Lines of Wellington, pourrait finalement voir le jour.
Prolifique, il l'était, reconnu, il l'était trop peu. Si nous parlions beaucoup de Raoul Ruiz en 2011, après qu'il ait remporté le Prix Louis-Delluc notamment, il ne faut pas oublier que le réalisateur signa son premier long-métrage en 1967, et qu'il en termina plus d'une soixantaine depuis (on parle de plus d'une centaine de films si on compte son travail à la télévision). Une oeuvre immense, que nous n'aurons peut-être jamais fini d'explorer, qui frôle autant la perfection technique que le goût pour les beaux personnages, grandiloquents et imposants.
Ce n'est pas pour autant que nous ne serons pas heureux d'apprendre que Raoul Ruiz travaillait, au moment de sa mort, à la préparation d'un nouveau film, Lines of Wellington donc, qui devait traiter de l'invasion du Portugal par la France, et notamment la bataille de Buçaco, en 1810. Sa veuve et monteuse (mais également réalisatrice) Valeria Sarmiento a en effet repris la production du film et s'attellera à sa réalisation. Un long-métrage qui réunira de grands noms du cinéma francophone, comme Catherine Deneuve, Isabelle Huppert, Mathieu Amalric, mais pas seulement, puisque nous pourrons également y voir John Malkovich. Le film, décrit par la société de production Alfama Films, ne devrait être rien d'autre qu'un Guerre et Paix au Portugal. Il devrait sortir sur les écrans de ce même pays d'ici la fin de l'année et, un peu comme Mystères de Lisbonne, être présenté à la télévision dans une version longue de trois parties.
Rappelons que John Malkovich était le Gustav Klimt dans le film que lui avait consacré le cinéaste. Isabelle Huppert, elle, avait cotôyé Raoul Ruiz pour Comédie de l'innocence. Catherine Deneuve pour Généalogies d'un crime mais aussi Le Temps retrouvé, avec Malkovich, où Marcel Proust, au bord de la mort, feuilletait un vieil album photo pour se remémorer sa vie, mais aussi ses oeuvres. Bientôt ses créatures de fiction mêleront à ses proches. Quittons-nous sur une sonate tirée de ce même film, et espérons que les représentants de son oeuvre, ses acteurs, pourront avoir le droit de jouer une dernière fois pour Raoul Ruiz.
Sonate de Vinteuil extrait de Le Temps retrouvé
Sources et images : The Playlist & Mubi (d'autres photographies de plans préparatoires du film sont à y découvrir).