Entre 1970 et 1977, il est un des piliers du théâtre du Soleil que dirige
Ariane Mnouchkine, avant de choisir de voler de ses propres ailes, non sans avoir goûté au « système » du théâtre « normal ».
Après un passage à l'Atelier théâtral de Louvain-la-Neuve, dirigé par Armand Delcampe en 1978-79, où il joue Lorenzaccio d'Alfred de Musset au festival d'Avignon et Les Trois Soeurs de Tchékhov dans une mise en scène d'Otomar Krejca, il se tourne vers l'écriture. Partant d'improvisations sur son enfance dirigées par Jean-Pierre Tailhade et de Clémence Massart (son ex-compagne dans la vie et au théâtre du Soleil), il crée en juillet 1981 au festival d'Avignon La Danse du diable, prologue à la saga Le Roman d'un acteur.
Le Roman d'un acteur est une oeuvre autobiographique monumentale, écrite, mise en scène et jouée par Philippe Caubère avec la collaboration de Jean-Pierre Tailhade, Clémence Massart, Véronique Coquet (sa compagne, rencontrée au théâtre du Soleil avec laquelle il fonde en 1985 la société de production La Comédie nouvelle) et Pascal Caubère (son frère). Composée de onze spectacles de 3 heures chacun, elle raconte la vie du jeune Ferdinand Faure - alter ego de Caubère - depuis l'enfance (La Danse du diable) jusqu'à la décision, après avoir quitté le théâtre du Soleil et le théâtre subventionné « classique », d'écrire et de monter lui-même ses spectacles (Le Bout de la nuit). Philippe Caubère a alors la trentaine.
L'auteur Caubère ne renie pas les influences de Proust, de Balzac, de Céline, comme celles de la commedia dell'arte et de
Fellini : l'ampleur de l'oeuvre, le monde qu'elle met en scène (les années 1970), la multitude de personnages peuvent donner le vertige, surtout lorsqu'on songe qu'après avoir créé les spectacles au fur et à mesure, de 1981 à 1993, il les a ensuite joués en même temps au rythme d'un par jour. Cela suppose de posséder, outre les déplacements, les effets de mise en scène et la voix et attitude de tous les personnages, près de 36 heures de texte en mémoire. Mais Le Roman d'un acteur est plus qu'un simple marathon théâtral. Le ton de ses spectacles oscille, dit-il, « entre Tintin et la tragédie », et passe du comique burlesque au pathétique.
Philippe Caubère, avec le succès de son premier spectacle, est très vite considéré comme un grand comédien. Mais il exerce ses talents également en tant qu'auteur et metteur en scène. C'est un homme de théâtre complet, à qui il manque encore une troupe pour ressembler définitivement au Molière qu'il a immortalisé en 1978 au cinéma, aux côtés de Joséphine Derenne, sous la direction d'Ariane Mnouchkine (rôle créé dans la douleur, comme il le raconte dans Les Marches du Palais).
En 2005, vint-cinq ans après le premier spectacle, Philippe Caubère remet sur le métier l'oeuvre-matrice, La Danse du diable, en repartant des improvisations de l'époque, pour faire de ce spectacle de 3 heures un nouveau cycle, L'Homme qui danse, comprenant cette fois huit spectacles de 3 heures chacun, dont les deux derniers, La Ficelle et La Mort d'Avignon, constituent, de son propre aveu, « l'épilogue à une autobiographie théâtrale bouleversante et comique ». Dans le film documentaire qui lui est consacré, En plein Caubère, il s'en explique, considérant son impossibilité à jouer autre chose et avec d'autres gens comme une composante incontestable de sa vie et un besoin vital ; si ce besoin rencontre le public, c'est l'idéal. Sinon, rien ne l'empêchera de continuer.