Triste nouvelle : l’une des plus grandes actrices française, la plus chabrolienne d’entre elles (avec Isabelle Huppert), est morte aujourd’hui. Stéphane Audran, 85 printemps, a rejoint son amie Bernadette Lafont, aux côtés de qui elle rayonnait, sous l’œil malicieux de Claude Chabrol, il y a près de 60 ans. Compagne du cinéaste, pour le compte de qui elle a interprété une trentaine de rôles, elle imposait toujours un peu plus son mystère impénétrable, sous le glacis d’une élégance indolente. Peut-être son prénom, Stéphane, tout à la fois masculin et diaphane, ces gestes tour-à-tour distants et compassionnels, devaient-ils durablement troubler. On retiendra sa profuse filmographie avec Chabrol donc (Les Bonnes Femmes, Le Boucher, La Femme infidèle...) mais aussi de nombreux emplois, où sa voix traînante, presque nasillarde, ainsi que son jeu mutin, chatoyaient sous l’œil des plus grands metteurs en scène : Buñuel (Le Charme discret de la bourgoisie), Sautet (Vincent, François, Paul et les autres), Litvak (La Dame dans l'auto avec des lunettes et un fusil) et même Fuller (Au-delà de la gloire)…
Souvent grimée en grande bourgeoise affectant l'indifférence, le masque finissait pourtant toujours par s'écailler : lorsque son regard s’abandonnait, comme absent à lui-même, le monde semblait s’y perdre. Et nous avec.
Dans cette scène des Biches (1968) de Chabrol, elle cabotinait aux côtés de Jacqueline Sassard :
On la regrette déjà. Adieu Stéphane.