Fils unique, de Madeleine, née Delarbre, et Yves Chabrol, il naît malgré les conseils de médecins qui recommandent à sa mère alors enceinte de trois mois d'avorter, les époux Chabrol ayant été trouvés inanimés suite à une asphyxie due à un chauffe-eau défectueux,. Il fréquente les salles de cinéma parisiennes depuis l'âge de 4 ans. Son père, pharmacien et résistant, envoie l'enfant, durant la Seconde Guerre mondiale, chez sa grand-mère paternelle, à Sardent, dans la Creuse. Plus tard, Claude Chabrol raconte qu'il fut projectionniste dans la salle de cinéma qu'il y improvise à 11 ans dans un garage désaffecté. De retour à Paris après la Libération, il fait des études de droit (au cours desquelles il côtoie Jean-Marie Le Pen,) puis, sous l'influence parentale, et sans conviction, des études de pharmacie, qu'il abandonne après avoir quadruplé sa première année. C'est le cinéma qui lui sourit : il entre à la
Fox (en 1955) comme attaché de presse, tout en agissant comme critique de cinéma dès l'aurore de la Nouvelle Vague française, aux côtés de François Truffaut et
Jacques Rivette, ses collègues aux Cahiers du cinéma. De 1953 à 1957, dans la revue à couverture jaune, fondée par André Bazin et
Jacques Doniol-Valcroze, il participe à la défense de la politique des auteurs et publie, en 1957 avec
Éric Rohmer, un livre sur
Alfred Hitchcock, le maître du suspense et celui qui a su imposer son style au système hollywoodien. Une autre rencontre est, pour la suite, également déterminante : celle du romancier
Paul Gégauff, son futur scénariste, dont l'univers l'éloigne de l'éducation bourgeoise reçue, bien qu'il s'en avoue toujours encore marqué de traces profondes, indélébiles.
Il épouse, le 26 juin 1952, la fille d'un industriel suisse, Agnès Marie-Madeleine Goute, qui devient en 1957 une riche héritière (25 millions d'anciens francs), ce qui permet au nouveau cinéaste de financer sa maison de production, AJYM (1956-1961) : un sigle formé des initiales du prénom de son épouse Agnès et de leurs deux fils, Jean-Yves (né en 1954 et futur architecte) et Matthieu (né en 1956 et futur compositeur de sa musique de films). L'entreprise AJYM démarre sur un court métrage de
Jacques Rivette, Le Coup du berger (1956), avec
Jean-Claude Brialy. Et, dès la fin de 1957, Claude Chabrol tourne avec ce Brialy, à Sardent (dans la Creuse), ses premiers films,
Le Beau Serge puis
Les Cousins, sortis en 1959, qui deviennent les premiers longs métrages -- « le manifeste inaugural » -- de la Nouvelle Vague.
Il divorce en 1964 et convole en secondes noces le 4 décembre 1964avec l'actrice
Stéphane Audran (née Colette Dacheville), qu'il connaît depuis 1957 et qui est la mère de son troisième fils, Thomas (né en 1964, futur acteur). Avec elle, il poursuit une fructueuse coopération, jusque très au-delà de leur séparation en 1980. Durant cette période, il se fait spécialiste de l'analyse féroce de la bourgeoisie française, dont l'apparent conformisme sert de couvercle à un bouillonnement de vices et de haines. Que ce soit sur le registre de la comédie grinçante ou du polar, souvent de concert avec le romancier scénariste
Paul Gégauff, il ne cesse d'en traquer l'hypocrisie, les coups bas et la bêtise, avec une délectation rare et jubilatoire, à laquelle participent activement ses acteurs fétiches :
Stéphane Audran,
Michel Bouquet,
Jean Yanne. Il dresse ainsi de la France des années 1970 un portrait sans concession, âpre et corrosif, où dominent La Femme infidèle,
Juste avant la nuit,
Les Biches.
À la fin de la décennie, il effectue un tournant en optant pour des sujets plus éclectiques dans lesquels son inspiration s'émousse parfois, il l'avoue. Mais sa rencontre en 1978 avec la jeune
Isabelle Huppert, qu'il contribue à révéler, est décisive. Violette Nozière, l'empoisonneuse parricide qui fit scandale dans les années trente, ajoute une dimension supplémentaire à la galerie de monstres jusqu'ici filmés par Chabrol (il avait déjà adapté un autre fait divers sanglant dans
Landru avec
Charles Denner). En même temps, il entame avec l'actrice un duo redoutablement efficace, qui touchera tant les rives de la comédie policière (
Rien ne va plus) que celles de l'adaptation littéraire (Madame Bovary) ou du film politique (L'Ivresse du pouvoir), culminant avec la décapante Cérémonie, adaptée du roman A Judgment in Stone (L'Analphabète) de Ruth Rendell.
Sur un registre plus léger, il aura également entre-temps fait jouer
Jean Poiret dans le rôle titre de
Inspecteur Lavardin ainsi que dans
Poulet au vinaigre, de la même manière qu'il revient régulièrement au « polar provincial », par des films tels que Au coeur du mensonge ou La Demoiselle d'honneur. Dans un registre fantastique inattendu, il réalise en 1976 Alice ou la dernière fugue, avec
Sylvia Kristel, un genre qu'il n'abordera qu'à cette unique occasion.
En 1983, il se marie en troisièmes noces, avec Aurore Pajot (aussi dite Aurore Paquiss ou Maistre, puis Chabrol), qui est sa scripte sur pratiquement tous ses films depuis Les Biches (1968). La fille de celle-ci et de l'acteur
François Maistre, Cécile Maistre (née en 1967), est son assistante sur de nombreux films. Il donne régulièrement des rôles à son fils cadet
Thomas Chabrol, tandis qu'un autre fils, Matthieu Chabrol, est compositeur de la musique de ses films à partir du milieu des années 1980. Des quatre enfants de la famille recomposée, Claude Chabrol n'a donc que son fils aîné, architecte, qui ne travaille pas à ses films.
Claude Chabrol reçoit, pour l'ensemble de son oeuvre cinématographique, le prix René-Clair de l'Académie française en 2005, la Caméra d'or de la 59eBerlinale en 2009 et le Grand prix 2010 de la SACD.
Puis arrive, à « l'hyperactif et plein d'allant, fourmillant de projets », ce « clap de fin » : Claude Chabrol meurt le 12 septembre 2010 à l'âge de 80 ans, notamment de problèmes respiratoires qui avaient justifié son hospitalisation les deux dernières semaines. Il est inhumé le 17 septembre, dans l'intimité, au Père-Lachaise (10e division) après un rassemblement des proches et des amis, sur le parvis de la Cinémathèque française,.