Oh nom de Dieu de bordel de merde : Jean-Pierre Marielle est mort
Jean-Pierre Marielle est mort hier, à 16h24, et laisse de nombreux cinéphiles orphelins. Nous revenons sur son parcours et lui rendons hommage, aux côtés de Télérama. L'occasion de nous faire savoir quels rôles du "grand duc" vous ont marqués.
Le communiqué est tombé comme un couperet : “Agathe Marielle a la tristesse d’annoncer que son mari, l’acteur Jean-Pierre Marielle, s’est éteint le 24 avril, à 16h24, à l’hôpital des Quatre-Villes, à Saint-Cloud, des suites d’une longue maladie. Les obsèques se dérouleront dans la plus stricte intimité.”
"Le temps qui reste ?"
— J'en sais rien, on verra bien.
Jean-Pierre Marielle nous a quittés hier. Jean-Pierre Marielle dont la “peur des cons” était proverbiale (“Ah oui, ça fout les jetons, les cons”), mais qui adorait les jouer, sans doute pour en atténuer le tourment. Hédoniste aussi raffiné que vulgaire, il pouvait ainsi s’ébaubir d’un cul, le peindre (Les Galettes de Pont-Aven, 1975), jouer les représentants de commerce aussi pathétiques que flamboyants (L'Entourloupe, 1980) ou se glisser dans le peignoir fushia de quelque provincial outrancier (Comme la lune, 1976).
L’oeil frisé et la moustache roublarde, tour-à-tour moelleux et gueulard, aussi à l’aise dans les pas de Brecht que sur les routes de quelque doux nanar : il en avalait les courbes de sa charpente de paysan bourguignon, bravache, terrien, avec, pourtant, l’élégance et la stature du monstre de théâtre, amoureux des lettres et de jazz, de Pinter et Chet Baker. Les mots et la mélodie : Marielle ne faisait l’amour qu’à ceux qui se laissaient prendre à sa petite musique. Pas étonnant alors que sa voix, chaude et profonde, presque pompière, en soit le plus bel organe. Elle fermait le charme.
S’il a si souvent joué les camelots, les hâbleurs, c’est que tout chez l’acteur invitait à en admirer la ruse – qui ne dupait personne –, mais dont on repoussait l’issue pour en déguster la farce : un jeu à deux, où chacun savait mais ne montrait rien, si ce n’était le plaisir de jouer et être joué.. Cynique mais d’un cynisme droit, respectueux et contemplatif, la faute sans doute à cette enfance rurale, entre un père industriel et une mère couturière : il passait ainsi avec la même facilité du directeur de supermarché (Quelques jours avec moi, 1988) à l’austère violiste pénétré par la grâce et l'affliction (Tous les matins du monde, 1991) jusqu’au dominicain humaniste et révolté (La Controverse de Valladolid, 1992).
Insatiable comédien dont le plus grand bonheur était de servir les textes et leurs auteurs, il était le dernier des Grands Ducs (1996), avec Rochefort et Noiret. Alors c’est un peu un monde qui meurt avec lui. “Les mois d'avril sont meurtriers”, où il donnait la réplique à Jean-Pierre Bisson, était son titre de film préféré : facétieux, droit et respectueux. Jusqu’au bout.
Pour lui rendre hommage, nous vous invitons à faire votre top 5 des films dans lesquels il vous a le plus émus, amusés, marqués. Nous en tirerons un top de la communauté pour l'éternité.
1) "Calmos", pour sa rue Gustave Flaubert
3) "Coup de torchon", pour sa justesse acerbe
C'est tout pour moi, le reste m'a moins marqué