Harry Potter à Bercy : l'avant-première des records et des polémiques

C'est la fin d'une ère pour les jeunes gens qui ont grandi aux côtés du sorcier Harry Potter : ce soir, le film sera présenté au Palais Omnisports de Bercy en avant-première sur ce qui devrait être l'écran 3D le plus grand du monde. Un événement aux dimensions impressionnantes qui n'a d'égal que la ferveur de son impatient public.

Les conditions semblent parfaites. L'écran, de plus de 30 mètres sur 15, pourrait entrer dans le Livre des records comme le plus grand écran 3D jamais conçu. Une partie de l'équipe du film sera présente (dont Jason Isaacs, Evanna Lynch et Clémence Poésy) pour assister, avec plus de 7 000 aficionados de la saga fantastique à leurs côtés, à l'épique conclusion de l'affrontement d'Harry Potter et de Lord Voldemort.

Voilà plusieurs semaines déjà que les spectateurs ont dû vider leurs poches pour réserver leurs places. Paradoxalement, la plupart des adeptes d'Harry Potter, petits ou grands, connaissent déjà la fin de leur histoire favorite sur le bout des doigts par l'intermédiaire du roman. Mais ce qui compte c'est autre chose. C'est la mise en scène d'un spectacle grandiose, une envie de repousser les limites techniques, qui captive et lève les foules.

L'expérience proposée, visant certes des records en termes de technique et d'audience, n'a rien d'originale. Depuis des années déjà les fans, d'univers de science-fiction ou d'héroïc-fantasy principalement, se regroupent en masse autour des cinémas, la veille de la sortie du nouvel épisode de leur franchise fétiche, pour une avant-première costumée et décontractée. En dix ans, Le Seigneur des Anneaux et bien entendu Star Wars ont popularisé cette tradition, profitant ainsi de l'alliance entre consommation de masse, marketing enragé, et une culture populaire et fédératrice.

L'événement dépasse donc, d'une certaine façon, le dispositif cinématographique. On propose au spectateur une immersion de plus en plus totale, la 3D aidant certainement, à un prix de ce fait réévalué. On vient assister au dernier Harry Potter comme un pèlerinage dans un lieu de culte, avec ceux qui partagent la même passion dévorante.

Le travail de Warner sur la sortie du film est méticuleux et remarquable. Néanmoins l'industrie du cinéma français ne semble pas particulièrement satisfaite de la situation. L'ARP, l'organisation des auteurs réalisateurs et producteurs de cinéma accuse le film de pratiquer « l'évasion fiscale ». Pour quelle raison ? L'avant-première ayant lieu à Bercy, et non dans une salle de cinéma, la Warner s'affranchit d'une taxe touchant au prix des billets de cinéma, la TSA.

Cette taxe, représentant 10% du prix du ticket, revient au CNC et contribue ainsi à un fonds de soutien de la création. Ce qui pourrait s'avérer une aubaine pour le CNC, et un léger manque à gagner pour la Warner, devient donc le sujet d'une grogne et d'une inquiétude grimpante. Car les sorties de blockbusters entraînant ce type de manifestation ayant tendance à se multiplier, tout le monde espère en tirer une substantifique compensation. Si l'ARP ne se dit pas contre ce genre de manifestation, l'association propose de ré-envisager cette taxe et qu'elle puisse s'étendre aux écrans qui ne seraient pas de cinéma. Une nouvelle mutation de l'industrie du septième art qui devra donc être examinée de près pour éviter les éventuels abus.

Pour ceux qui n'ont pas eu la chance d'avoir une place sachez que près de 250 cinémas prévoient de projeter le film ce soir, à minuit. L'occasion de retrouver des cinéphiles partageant la même passion, de crier en choeur durant les scènes les plus éprouvantes, et de se consoler une fois qu'Harry Potter aura tiré sa révérence.

Source : Europe 1