Pourquoi la communauté n'est pas trop fan de “Ma vie avec John F. Donovan” de Xavier Dolan ?
Budget pharaonique, “hollywoodien”, de 23 millions d'euros, soit trois fois le montant de son film le plus cher (Juste la Fin du monde, 2016), Ma vie avec John F. Donovan, le nouveau Xavier Dolan n’a pour l'instant pas le succès escompté. Assassiné par la critique à Toronto, pas distribué aux Etats-Unis et seulement troisième meilleur démarrage pour un film du réalisateur québécois (alors qu'il établit son record de copies en France), on peine à croire que le bouche à oreille suffise à en faire un classique. Comment l’expliquer ?
Grâce à Vodkaster, le meilleur instrument pour mesurer la cote du cinéaste canadien : 25e réalisateur préféré de la communauté (sur quelques milliers) mais aussi parmi les plus haïs (13e), le jeune prodige ne nous laisse jamais indifférents : c’est une longue histoire d’amour-haine passive-agressive. Et il y a de quoi : oscillant entre admiration pour son audace formelle et rejet d’une pose insolente, on se demandait déjà il y a cinq ans si l’élève Dolan avait une tête bien faite ou une tête à claque. Spoiler : une tête à claque, mais d’un cheveu seulement (tirée d’une mèche reposant négligemment sur le front). Ne serait-ce pourtant pas là toute la singularité du jeune trentenaire, ce petit je-ne-sais-quoi attachiant qui expliquerait, in fine, l’indifférence polie qu’a rencontré Ma vie avec John F. Donovan ?
Les Vodkastos ont en tout cas été intransigeants, infligeant à la bluette adolescente (“le meilleur film que je puisse, à ce moment de ma vie, vous donner”) son plus faible score, tous films confondus (40% de taux de satisfaction). Et même s'il se trouve encore quelques défenseurs, les reproches fusent : “l'émotion reste prisonnière” (@Anaphor) dans cette “épopée qui en reste à l'état larvaire, un peu flasque” (@Kikuchiyo) car “dépouillé de ce qui faisait son charme (sa morgue de gosse), et dont il ne reste qu’un kitsch académique, creux.” (@lebateausobre).
Mais pourquoi tant de haine ?
D'abord, pour des raisons de rythme et de longueur (le premier montage durait quatre heures !), l’immense Jessica Chastain a été coupée au montage. Mais n’est pas Terrence Malick qui veut et ça en a agacé plus d’un. Plus qu'un agacement, l'absence de figure “explosive” a probablement arasé les habituelles aspérités du cinéma de Dolan. L’actrice, qui jouait en effet une odieuse rédactrice en chef de journal people, aurait pu apporter ce fameux soufre qui enflamme habituellement le coeur des Vodkastos. Comme l'explique @Bakou9 : “En aseptisant son style, il perd ce qui faisait son sel, l'émotion s'envole et reste un grotesque surjeu généralisé.” Le récit, dès lors trop rigide, ne procure plus aucun trouble : “En polissant, domestiquant et maîtrisant sa fièvre cinématographique, Dolan semble avoir perdu de son impact, esquivant l'émotion.” justifie @Vance.
Mais ces énormes coupes ont sans doute également désarticulé une histoire originellement plus pleine, plus complexe. Ainsi @Cath44 reproche au montage ses ellipses qui font qu'on “se perd parfois dans ces allers-retours, ces flashs-backs et différentes temporalités” ou qu'on “passe parfois trop rapidement sur certains personnages.” @ianov confirme en y voyant “une fièvre d'écriture intacte, mais une oeuvre désordonnée, comme les persiennes sur le royaume de Dolan.” “Les fans n'auront qu'à rêver un film remonté qui rende justice à son sujet et à ses comédiens” achève @jolafrite...
Alors bien sûr, ça n'est pas un naufrage, on a encore plaisir à partager les obsessions du cinéaste et la note moyenne n'est pas si catastrophique. Mais c'est un sérieux avertissement : Xavier Dolan n'est jamais meilleur que lorsqu'il trouve un équilibre entre une pointe de classicisme et des jaillissements d’exubérance, un style pompier tempéré par la sincérité du mélo. Ironiquement, ce film qui met en garde contre le risque de s'abandonner aux sirènes des Majors est peut-être la meilleure preuve de ce qu’il avance : avec ce premier jet “hollywoodien”, il s'est sans doute un peu perdu et beaucoup de fans avec lui. Il expliquait dans une interview à Télérama à quel point la création du film était douloureuse, du financement à la postproduction : c'est peut-être là une leçon à retenir ; revenir au pays, aux fondamentaux, à l'enfance de l'art. Tout simplement, retrouver le sale gosse en lui.
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zephsk24 mars 2019 Voir la discussion...
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zephsk24 mars 2019 Voir la discussion...
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zephsk27 mars 2019 Voir la discussion...
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sgabedou27 mars 2019 Voir la discussion...
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