Trance : Danny Boyle regrette une "Pixarification" du cinéma
Exit les infidélités olympiques ! Danny Boyle signe avec Trance son retour derrière la caméra, un peu plus de trois ans après le survival 127 heures et ses six nominations aux Oscars.
De passage dans la capitale pour la promotion du film, en salles aujourd'hui, le réalisateur s'est paré de son flegme britannique pour évoquer sans détour son thriller noir et nous gratifier, au passage, de quelques infos sur ses projets futurs, dont un certain Trainspotting 2.
On qualifie souvent Danny Boyle de cinéaste caméléon, un touche-à-tout papillonnant entre les genres avec une aisance frisant l'indécence. Qu'il explore l'ivresse de l'argent et de la drogue (Trainspotting, Petits meurtres entre amis), l'espace et la surface du soleil (Sunshine), la cité londonienne ravagée par un virus (28 jours plus tard) ou les mille visages de l'Inde (Slumdog Millionnaire), le metteur en scène mancunien ne faillit pas à la mission qu'il a fait sienne, celle de stimuler l'imaginaire et transporter le spectateur vers des horizons inconnus.
Pour son nouveau long-métrage, le britannique a pris son cinéma à revers en choisissant de sonder l'infiniment proche : les tréfonds du cerveau humain et de la séquence mémorielle. Trance, c'est avant tout la confrontation triangulaire de protagonistes aux motivations incertaines. Simon (James McAvoy) est commissaire-priseur spécialisé dans les oeuvres d'art. Dans l'optique de dérober un tableau de Goya estimé à plusieurs millions de dollars, il s'allie avec un gang de malfrats emmené par Franck (Vincent Cassel). Au cours de l'opération, Simon reçoit un violent coup sur la tête qui l'empêche de se souvenir où il a planqué le tableau. La torture se révélant inefficace, Franck fait appel à une hypnothérapeute (Rosario Dawson) pour tenter de déverrouiller l'esprit de Simon.
Le noir au féminin
S'inscrivant dans une mythologie moderne par sa dimension émotionnelle et psychologique, Trance navigue dans les eaux poisseuses du thriller noir, dans la lignée des classiques des années 70 auxquels Boyle voue une passion dévorante. Situations labyrinthiques, conflits intérieurs, violence graphique et désirs sexuels (gloire au full frontal) : si le réalisateur ne prétend pas en réinventer les codes, la filiation est évidente, et assumée.
Dès les toutes premières heures du projet, l'idée était de placer une femme au coeur de l'intrigue. « J'ai fait une dizaine de longs-métrages et travaillé avec de grandes actrices comme Tilda Swinton, Virginie Ledoyen, Kerry Fox, Naomie Harris, Rose Byrne et tout un tas d'actrices fantastiques, explique Danny Boyle. Et puis je me suis rendu compte qu'aucune d'entre elles n'avait jamais été le point central d'un de mes films. C'est une disgrâce absolue ! »
Du cran et du charisme : voilà les attributs que devait nécessairement posséder la figure féminine de Trance, pour porter sur ses épaules une oeuvre à la croisée des genres. Pour camper l'énigmatique Elizabeth, le réalisateur britannique a toujours eu en tête le nom de Rosario Dawson. « Je l'avais déjà rencontré il y a sept ou huit ans pour un projet qui n'a finalement jamais vu le jour et elle m'avait fait forte impression. J'ai toujours pensé qu'elle serait capable de tenir un premier rôle. Elle est épatante : la façon dont elle regarde la caméra, ses mouvements quand elle se déplace... Elle a une vraie présence dans le film. Je ne voulais pas d'une Elizabeth stéréotypée blonde glaciale (« icy blonde »). Trance mêle des éléments de film noir et Rosario joue "la" femme fatale d'une manière pesée et mûrement réfléchie. Elizabeth est prête à tout pour d'atteindre ses objectifs : survivre et avancer. Elle choisit de personnifier ce concept de la femme fatale parce que son histoire est marquée de profondes blessures. »
Une fois les prises de vue mises en boîte à l'automne 2011, l'avancée du projet a connu une tournure sinon chaotique du moins complexe. Danny Boyle s'était déjà engagé à devenir l'ordonnateur de la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques d'été de Londres 2012. Une « grande fierté » certes, mais nécessitant tout de même des mois de préparation, rendant impossible l'achèvement, dans l'immédiat, du montage. Cette pause forcée eu cependant quelques effets bénéfiques sur le film.
« La cérémonie des Jeux Olympiques est un peu "l'événement Pixar ultime" : une grande fête familiale intergénérationnelle. Bien sûr, c'était un vrai régal pour moi d'honorer mon pays mais j'avais parfois l'impression d'étouffer mon côté sombre, ce qui a probablement contribué à faire de Trance le jumeau maléfique des Jeux. Et puis il y a eu ce gouffre entre le tournage et le montage, qui s'avéra être très utile. Le problème d'un récit à tiroirs comme Trance est que l'on devient rapidement très secret et paranoïaque sur le scénario, on fait tellement attention à ce qu'aucune information ne filtre qu'on finit par ne plus rien donner sur le produit final. Six mois après, ma mémoire m'avait joué quelques tours ; au montage, j'avais donc ce regard presque neuf, comme un spectateur qui découvre le film. C'était important pour conserver intact le plaisir de la surprise. »
De la suite dans les idées
On le sait, Danny Boyle ne s'impose aucune frontière et explore sans boussole les contrées cinématographiques. Alors quand on évoque ses projets d'avenir, la réponse peut parfois s'avérer... surprenante !
En attendant de voir le cinéaste nous justifier (ir)rationnellement les envolées musicales de son prochain spectacle, une autre idée ô combien réjouissante est longtemps restée à l'état de rumeur : celle d'une suite au cultissime Trainspotting.
Officiellement confirmé depuis quelques mois, Trainspotting 2 devrait reprendre les personnages imaginés par l'écrivain écossais Irvine Welsh. Rappelons que le récit du film original décrivait les frasques tragicomiques d'un groupe de marginaux accros à l'héroïne dans la ville d'Édimbourg. Vingt ans plus tard, qu'ont-ils à dire ? C'est là le point névralgique de cette suite.
Trance sort aujourd'hui dans les salles de cinéma. Et si vous vous posiez la question, non, Danny Boyle n'a jamais été hypnotisé... fort heureusement pour lui. « J'ai une sainte horreur des métaux chauffés à blanc, sûrement un traumatisme d'enfance. Une hypnothérapeute mal avisée pourrait m'en faire dire beaucoup avec cette simple vision. »
Et quel serait le mot-clé pour le sortir de sa transe ? « Le mot le plus beau de la langue anglaise, selon Donnie Darko. Cellar door. »
Un petit MovieQuiz spécial Danny Boyle ?
Merci à Annabelle pour la traduction et Nicolas pour la caméra.
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fabs88 mai 2013 Voir la discussion...
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TomWitwicky8 mai 2013 Voir la discussion...
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fabs88 mai 2013 Voir la discussion...
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TomWitwicky9 mai 2013 Voir la discussion...
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ozinou12 mai 2013 Voir la discussion...
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louetdad12 mai 2013 Voir la discussion...
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Bully25 juin 2013 Voir la discussion...
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fabs825 juin 2013 Voir la discussion...
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Bully25 juin 2013 Voir la discussion...