Ciné-Club
C'est la programmation de mon petit mais vigoureux ciné-club de campagne (1 film par mois, sauf : décembre et les 2 mois de "grandes vacances").
Saison 1:
- « Quai des orfèvres », Henri Georges Clouzot
- « Le salaire de la peur », Henri Georges Clouzot
- « Les Diaboliques », Henri Georges Clouzot
- « Viridiana », Luis Buñuel
- « Belle de jour », », Luis Buñuel
- « Le charme discret de la bourgeoisie » », Luis Buñuel
- « La strada », Federico Fellini
- « La dolce vita », Federico Fellini
- « Amarcord », Federico Fellini
Saison 2 :
• « New-York Miami », Frank Capra
• « Vous ne l’emporterez pas avec vous », Frank Capra
• « La vie est belle », Frank Capra
• « La sirène du mississipi », François Truffaut
• « L’enfant sauvage », François Truffaut
• « La nuit américaine », François Truffaut
• « M le maudit », Fritz Lang
• « Furie » », Fritz Lang
• « Les contrebandiers de Moonfleet », Fritz Lang
Saison 3 :
• « L’armée des ombres », Jean-Pierre Melvile
• « Le samouraï », Jean-Pierre Melville
• « Le cercle rouge », Jean-Pierre Melville
• « Les enchainés », Alfred Hitchcock
• « Sueurs froides », Alfred Hitchcock
• « La mort aux trousses », Alfred Hitchcock
• « La bête humaine », Jean Renoir
• « La règle du jeu », Jean Renoir
• « French cancan », jean Renoir
Saison 4 :
• « La bataille du rail », René Clément
• « Jeux interdits », René Clément
• « Plein soleil », René Clément
• « Les amants diaboliques », Luchino Visconti
• « Le guépard », Luchino Visconti
• « Mort à Venise », Luchino Visconti
• « Eve », Joseph Mankiewicz
• « La comtesse aux pieds nus », Joseph Mankiewicz
• « Le limier », Joseph Mankiewicz
Saison 5 :
• « Le jour se lève », Marcel Carné
• « Les visiteurs du soir », Marcel Carné
• « Les tricheurs », Marcel Carné
• « Les fraises sauvages », Ingmar Bergman
• « Persona », Ingmar Bergman
• « Scènes de la vie conjugale », Ingmar Bergman
• « Le voleur de bicyclette », Vittorio de Sica
• « La Ciociara », Vittorio de Sica
• « Le jardin des Finzi-Contini », Vittorio de Sica
Aujourd'hui, les "candidats" pour la saison 6 sont : Rosselini, Tavernier, Ford ou Welles ... (mais ça peut changer !)
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1(1947)elge“ Le faux coupable, la jalousie, le handicap : les obsessions de Clouzot dialoguent avec celles d’Hitchcock. ” — elge 28 mars 2014
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2(1953)elge“ La fin du film transforme la bravoure de Mario en fatale impétuosité infantile : un des plus célèbres montages alternés du cinéma mondial. ” — elge 15 août 2011
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3(1955)elge“ le spectateur prend le point de vue de Christina et il subit avec elle, ses humiliations et ses terreurs, jusqu’à sa « démolition » finale. ” — elge 15 août 2011
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4(1961)de Luis Buñuel avec Francisco Rabal, Fernando Rey, Jose CalvoDrame | 1h31elge“ Bunuel croyait au pouvoir provocateur du cinéma : chasteté contre perversité, religion contre réalité sociale, charité contre malheur. ” — elge 11 mars 2012
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5(1967)de Luis Buñuel avec Catherine Deneuve, Jean Sorel, Michel PiccoliDrame | 1h41elge“ Plus que son amoralisme, un peu puéril, retenons du Bunuel de «Belle de jour» que sa position morale précède toujours sa posture esthétique ” — elge 13 octobre 2011
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6de Luis Buñuel avec Fernando Rey, Paul Frankeur, Delphine SeyrigFilm fantastique, Comédie | 1h40elge“ « Je ne vois de dignité que dans le néant » disait Buñuel. Ce film en est l’illustration la plus cinglante. Amer et désespéré ! ” — elge 14 août 2011
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7(1954)Drame | 1h40elge“ Le cinéma de Fellini est celui de l’absurde. L’absurde est misérable, ridicule, absurdement poétique. L’absurde est l’ironie du désespoir. ” — elge 9 août 2016
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8(1960)elge“ Dernier plan: sur la plage Marcello quitte la scène. "L'ange souriant" le regarde partir puis, lentement, se tourne vers NOUS. Fondu au noir ” — elge 9 août 2011
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9(1973)de Federico Fellini avec Magali Noël, Pupella Maggio, Dina Adornielge“ Le souvenir Fellinien est une « réalité augmentée », un mensonge qui dit la substantifique vérité d’un passé. ” — elge 9 août 2011
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10(1934)de Frank Capra avec Clark Gable, Claudette Colbert, Ward BondComédie | 1h45elge“ Ce mur de Jericho est plus qu’une barrière sexuelle, c’est une cloison psychologique et sociale, bientôt minée par leur désordre sentimental ” — elge 26 décembre 2013
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11de Frank Capra avec Jean Arthur, Lionel Barrymore, James StewartComédie | 2h06elge“ Derrière la rébellion légère et humaniste, derrière la comédie sentimentale, il y a plus: un désir d’utopie. Et le film devient inaltérable. ” — elge 20 juin 2013
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12(1946)de Frank Capra avec James Stewart, Ward Bond, Donna ReedFilm fantastique, Drame | 2h16elge“ Un merveilleux conte qui combine comédie, drame, romanesque. Et un beau personnage Capraïen: sacrificiel, idéaliste, candide. Euphorisant ! ” — elge 19 avril 2013
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13(1969)Drame | 1h57elge“ Ecrit en marge du manuscrit d’un scénario de F.Truffaut : « Penser toujours qu’un bon film d’amour doit ressembler à un film policier ». ” — elge 19 avril 2013
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14(1970)Drame | 1h21elge“ On perçoit d'abord la sècheresse documentariste, impression renforcée par la voix monocorde de Truffaut. Puis la dernière image nous chavire ” — elge 15 août 2011
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15(1973)elge“ Paradoxalement, en dévoilant le tournage d’un film en train de se faire, Truffaut ne démystifie rien, il mythifie le cinéma lui-même ! ” — elge 13 août 2011
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16(1931)de Fritz Lang avec Ellen Widmann, Inge Landgut, Rosa Valettielge“ D'autant plus terrifiant qu'intemporel et universel. Et 1 an après l'arrivée du "parlant", un emploi hors champs du son proprement génial. ” — elge 2 mai 2012
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17(1936)de Fritz Lang avec Sylvia Sidney, Leila Bennett, Helen Flintelge“ Chez Lang, entre loi et vengeance, un héros est forcément dans un piège. Et il peut devenir un monstre. Le prolongement des thèmes de « M ». ” — elge 31 mai 2012
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181h23elge“ Le chemin entre le bien et le mal est une grande aventure: plus mystérieuse et plus terrifiante vue par un enfant et filmée par Fritz Lang ! ” — elge 6 février 2012
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19(1969)elge“ Une illustration sublime de l’éthique spinoziste: si jusqu’à la plus fine limite on croit que l'on ne va pas mourir alors on ne meurt jamais ” — elge 31 octobre 2012
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20(1967)elge“ Jef n’est pas un homme normal, dit le commissaire. Joué par un Delon hiératique et taiseux. Glacial et, finalement, terriblement romantique! ” — elge 15 août 2011
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21(1970)elge“ Epurer, encore et encore. Réduire, soustraire, simplifier. Jusqu’à la moelle du genre. Et à la fin, cette rose que Corey laisse à Vogel... ” — elge 6 mai 2013
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22(1946)de Alfred Hitchcock avec Cary Grant, Ingrid Bergman, Claude Rainselge“ Quand Hitch entremêle mélodrame et espionnage cela donne le plus émouvant des suspenses et le plus futé des Mac Guffins ! ” — elge 31 janvier 2012
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23(1958)elge“ Dans cette énigme incertaine, dans ce regard-Pygmalion, ces artifices, cette triste animalité, on voit l’âme d'Hitchcock. Et c’est émouvant. ” — elge 9 mai 2019
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24(1959)Thriller | 2h16elge“ Revoyez encore et encore ce chef d'oeuvre! Enfin, vous verrez une histoire de train de mains et de visages, une affaire d'érotisme en somme ” — elge 9 août 2011
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25(1938)de Jean Renoir avec Jean Gabin, Simone Simon, Julien CaretteDrame | 1h40elge“ Gabin en héros de tragédie antique, Carette en Sganarelle, Simon en ingénue fatale, et le naturalisme de Zola devient théâtre de Jean Renoir ” — elge 22 avril 2013
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26(1939)de Jean Renoir avec Nora Gregor, Mila Parely, Paulette Dubostelge“ « Un drame gai » disait Renoir. Le constat amer mais chaleureux d’une décadence. Qui fera « La règle du jeu » d’aujourd’hui ? ” — elge 17 août 2011
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27(1955)de Jean Renoir avec Françoise Arnoul, María Félix, Dora Dollelge“ French Cancan est un brin archaïque certes, mais son archaisme il l'assume bien ! Un hymne immortel au théâtre, au « musical », au cinéma ! ” — elge 10 août 2011
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28(1946)de René Clément avec Charles Boyer, Mme Salina, Jean ClarieuxFilm d'action, Drame | 1h22elge“ Démarre comme un film de propagande référençant Eisenstein, puis prend une ampleur épique sans négliger quelques inserts cruels et poétiques ” — elge 28 septembre 2013
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29(1952)Drame | 1h26elge“ A la fin, aucune irrationalité dans les cris de Paulette. C’est l’enfance qui garde ses secrets et proclame son absolu. Et c’est bien ainsi. ” — elge 28 octobre 2013
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30(1960)de René Clément avec Alain Delon, Marie Laforêt, Maurice Ronetelge“ Entrelacements de "dolce vita" et de "thriller" : vivre avec la conscience de l’éphémère, prendre la mesure de ses actes, et continuer... ” — elge 28 novembre 2013
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31(1943)Drame | 2h14elge“ "Néopératique", pas néoréaliste : abstrait, violent, extrême, révélant la vérité des êtres, lyrique, forcément lyrique. ” — elge 18 janvier 2014
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32(1963)Drame | 3h05elge“ Somme parfaite Viscontienne : L’aristocratie lucide de sa décadence, la révolution confisquée par la bourgeoisie, La sensualité carnassière. ” — elge 2 mars 2014
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33(1971)Drame | 2h11elge“ Trop tard... Comme si, hors de la caverne de Platon, l’illusion d’avoir été avait tué le courage d'affronter l’éblouissement de la beauté. ” — elge 27 mars 2014
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34(1950)Drame | 2h18elge“ Dans ce monde de guerre des égos, la doublure devient double, puis unique... et ça recommence. Film parfait, comme ce mouvement perpétuel. ” — elge 4 juin 2013
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35(1954)Drame | 2h04elge“ Mankiewicz escamote le plus souvent le corps d’Ava Gardner. Un unique et merveilleux plan-séquence lui donnera la dignité de la chair. ” — elge 29 mai 2014
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36(1972)Thriller | 2h18elge“ C’est le jeu d’un immense réalisateur, parti sans dénouer toutes les énigmes ni tous les faux-semblants (mais que fait donc ce ciré rouge ?) ” — elge 16 juin 2013
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37(1939)de Marcel Carné avec Jean Gabin, Arletty, Jules BerryDrame | 1h33elge“ Ça parle de quoi? D’amour. Qu’as-tu vu? Un œil gai, un œil triste. C’est beau? Trauner. Ça finit comment? (je dois y aller, le jour se lève) ” — elge 16 avril 2013
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38(1942)de Marcel Carné avec Arletty, Fernand Ledoux, Marie DéaDrame, Film fantastique | 2h01elge“ Ne serait-ce pas ça l’art (celui qui touche juste, juste celui qui touche) : sur le fil, entre bouffonnerie et pureté ? ” — elge 10 juin 2013
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39(1958)2h00elge“ Carné sort dans la rue, nous montre une phénoménale poursuite en auto, coltine sa "Qualité France" à "La nouvelle vague", et fait match nul. ” — elge 19 novembre 2014
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40(1957)Drame | 1h31elge“ La réponse à la question : « pourquoi doit-on vivre ? » ressemble à : « il n’y a pas de leçon ». Enigmatique, vertigineux, Bergmanien. ” — elge 15 janvier 2015
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41(1966)Drame | 1h25elge“ Contre la folie du monde, aller jusqu'à l’autre, jusqu’à être l’autre. Et la tentation du mal contre la peur du vide. Poème psychanalytique. ” — elge 27 février 2015
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42(1973)de Ingmar Bergman avec Liv Ullmann, Erland Josephson, Jan MalmsjoDrame | 2h47
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43(1948)Drame | 1h33elge“ La grande idée de Vittorio de Sica : les enfants nous sauvent de l'indignité. ” — elge 20 novembre 2013
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44(1960)Drame | 1h50elge“ Film de stars: De Sica, Loren, Ponti, Zavatini, Moravia. Y voir un surprenant Belmondo et surtout une incandescente Eleanora Brown. ” — elge 5 juin 2015
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45(1970)Drame | 1h30elge“ Ce jardin est une ile, une ile d’insouciance, un temps préservée de la menace extérieure. Et dans ce jardin, une énigme, insolente et belle. ” — elge 14 novembre 2013
Le néoréalisme, qu’est-ce que c’est ?
Il faut se poser d’abord la question : qu’est-ce qui nous impressionne dans « Le voleur de bicyclette » ? Comment le film nous touche ?
- Il fait du plus banal des faits divers, une tragédie
- Il fait que des péripéties quotidiennes et minuscules atteignent notre conscience
- Il comprend la condition humaine et nous parle de dignité
- Il dépasser la fable sociale, voire marxiste, pour atteindre une universalité Chaplinesque (la fin est Chaplinesque)
- Il arrive à la conclusion que c’est l’enfant qui sauve l’adulte de l’indignité
Autre question : sont-ce donc toujours des mélodrames ?
En fait, non, parce que la forme d’un film néoréaliste est particulière. On peut même d’abord penser qu’il n’a pas de forme. Tout comme les caractéristiques de la « forme » (la profondeur de champ, les travellings, …) affectent notre relation intellectuelle à un film, l’absence d’effets fait de même.
L’ellipse, par exemple, est un effet de style voulu dans le cinéma disons « classique » (dans lequel on peut « ranger » le mélodrame), un travail de montage élaboré. Par un effet souvent malin, qui parle à notre grammaire du cinéma, l’ellipse donne en elle-même une information. Dans un film néoréaliste, elle tout le contraire, elle est réellement une lacune, elle est un manque d’information, comme « dans la vraie vie ».
L’émotion, alors, ne nait pas du découpage. L’évènement se suffit à lui-même et l’impression de vérité remplace l’émotion immédiate. Et chaque évènement semble avoir le même poids. Le sens et l’émotion apparaissent a posteriori. Le film « classique » mène son spectateur dans son histoire, le film néoréaliste produit des sensations que le spectateur reconstruit en une émotion.
La réalité en tant que spectacle.
Gilles Deleuze a étudié le cinéma moderne et a théorisé l’image-mouvement et l’image-temps.
L’image-mouvement est attribuée au cinéma « classique », cinéma qui, en gros, se base sur un récit, donc sur un mouvement. L’image-mouvement est alors associée à une perception subjective, celle qui est « manipulée » par la mise en scène.
Deleuze évoque une « crise » de l’image-mouvement dès le néoréalisme italien. Dans « Le voleur de bicyclette », le récit est brisé, les évènements ne se raccordent pas a priori (par exemple, il y a cette pluie qui interrompt sans véritable signification narrative la recherche), il y a les sons ne font pas forcément référence à l’action (la foule de la course cycliste, la cloche du tramway).
Il n’y a pas non plus de distinction a priori entre l’important et le négligeable, entre le banal et l’extrême. L’image-mouvement (ou image-action) laisse place dans le cinéma néoréaliste comme dans le cinéma dit « moderne », à une image pensante, contemplative, une image-temps. Le spectateur n’est pas engagé dans une action, il enregistre des stimuli (optiques et sonore).
Ce qui reste « classique » cependant dans « le voleur de bicyclette », c’est la mise en scène de l’évolution du rapport père-fils : le fils nous est présenté comme un « vieil enfant », qui peut aller jusqu’à sermonner le père ; tandis que le père lui, avec son langage corporel, semble constamment n état de sidération comme un enfant qui ne sait pas comment réagir.
Jamais de fin.
A la fin, rien n’est résolu, elle reboucle avec le début. La balade, probablement sans plus d’espoir, reprend… mais main dans la main…
Du classique au moderne.
Dans le cinéma néoréaliste, le regard objectif (moderne) se confond avec le regard subjectif (classique). Et c‘est ce qui en fait la passerelle idéale entre le cinéma classique et le cinéma moderne, comme l’impressionnisme a été la passerelle entre la peinture figurative classique et l’abstraction.